Molière, le plus grand génie du théâtre français, est né voici 400 ans. L’Italie, elle, a célébré tout au long de l’année 2021 le 700 anniversaire de la disparition de Dante. Les pouvoirs publics ont organisé une immense mobilisation, en Italie et dans tous les centres culturels italiens à l’étranger: expositions innovantes, initiatives vers le jeune public, institution d’une journée «dantesque» annuelle…
En France, l’anniversaire de Molière sera certes célébré par la Comédie-Française, le château et la ville de Versailles, Grignan ou France Télévisions, mais aucune mobilisation nationale, aucune impulsion pour faire partager à tous nos concitoyens l’empreinte indélébile que Jean-Baptiste Poquelin a laissée dans la culture universelle.
Cet exemple est symptomatique de ce qu’est devenue notre ambition culturelle. Une action gouvernementale décrite par la Cour des comptes en décembre dernier comme «un saupoudrage des aides selon une politique de guichet (…), ce qui rend de moins en moins lisibles les priorités de l’action culturelle de l’État».
Si je suis élue présidente de la République, ma politique culturelle sera autrement ambitieuse, justement inspirée par l’esprit de Molière, l’esprit français. Contrairement à Emmanuel Macron, je défends l’idée d’une culture française à vocation universelle, celle de la patrie des arts et lettres qui se distingue depuis toujours par le message qu’elle porte au monde. Et quel meilleur exemple de cette vocation que Molière?
Par le rire et l’insolence, il dénonce les sectarismes, les visions étriquées de son époque. Il a mis au jour avec courage les travers de la société du XVIIe siècle: l’hypocrisie sociale, les inégalités, les oppressions subies par les femmes, les sectarismes religieux, sujets ô combien toujours d’actualité.
Molière, c’est notre héritage. La France possède un patrimoine littéraire, artistique, monumental, muséal qui constitue notre bien commun. Notre fierté. Je décréterai une mobilisation générale pour le patrimoine, à l’instar de ce que j’ai fait en triplant les aides au patrimoine dans ma région. La France est aussi un pays de création qui a inventé le droit d’auteur, qui protège ses artistes et ses interprètes. Je serai toujours aux côtés de ceux qui se battent pour l’art et pour la création culturelle.
Molière incarne le théâtre de tréteaux, celui qui chemine de village en village. Avec moi, le spectacle vivant sortira de ses murs. Je connais l’extraordinaire vitalité de toutes ces compagnies, ensembles musicaux ou associations culturelles qui foisonnent dans notre pays. Je sais l’engagement des élus de terrain pour faire vivre la culture avec les richesses de leurs territoires. Je veux donner toute la place qui revient à ces initiatives et les encourager.
Molière, c’est aussi la langue française et le rayonnement de notre pays. L’Italie a Dante, l’Angleterre a Shakespeare, nous avons Molière. Si l’on goûte tant ses spectacles, c’est qu’il a fait du français une langue de combat, d’ironie et de finesse. Je me battrai pour réaffirmer la place de la langue de Molière dans le monde et défendre la francophonie sur tous les continents. Nos livres, nos films, nos musiques et nos savoir-faire doivent s’exporter partout où la France est reconnue au titre de son art et de sa culture.
Molière n’est pas qu’un auteur scolaire mais il parle à nos enfants! Oui à une éducation à l’art et à la culture pour tous nos jeunes, à condition que la discipline n’exclue pas le jeu, et que l’apprentissage soit aussi synonyme de liberté! Je demanderai à chaque établissement scolaire de porter un projet culturel et nous jumellerons chaque école, collège ou lycée avec des institutions culturelles, des conservatoires et des artistes, afin de permettre à chaque enfant de pratiquer une culture vivante et joyeuse.
Je veux redonner toute leur vitalité aux clubs de théâtre, de cinéma ou de lecture partout sur le territoire, comme aux concours d’éloquence, aux chorales et aux orchestres scolaires. En bref, je ferai de l’éducation artistique et culturelle une réalité pour chaque élève. De mon expérience d’élue et de présidente de région, je sais que l’on peut compter sur les forces vives de nos institutions culturelles et sur les nombreuses initiatives prises par les éducateurs de nos écoles.
Cette politique de démocratisation culturelle doit veiller à limiter le coût de l’accès à la culture et aller vers ceux qui sont victimes de l’effet «d’intimidation culturelle» dont parle Frédéric Mitterrand. Parce que la culture est un bien essentiel, j’instaurerai un taux réduit de TVA à 5,5 % sur tous les biens culturels pour baisser le prix des disques, de la musique enregistrée ou de l’accès aux musées et aux lieux de patrimoine.
La politique culturelle doit être animée à la fois d’actes concrets et d’une vision. En mai 2019, Francis Huster invitait le président de la République à faire entrer Molière au Panthéon. Je demande solennellement à Emmanuel Macron de saisir cette proposition, appuyée par de nombreuses personnalités. Molière, c’est le génie français et nous devons rester fidèles à son esprit.